Au cœur d’un
tableau
Un tableau, il faut
se garder de vouloir l’appréhender au
travers des commentaires qu’il peut éventuellement
susciter. La seule manière de l’aborder,
c’est de le regarder en silence, en se faisant
toute réceptivité, en s’offrant
à l’émotion qu’il ne manque
pas d’éveiller en nous. Les tableaux
de Jean-Pierre Baillet me paraissent venir de très
loin. Ils me font songer à des palimpsestes,
à ces pierres et ces terres cuites mises à
jour par des archéologues et sur lesquelles
des hommes disparus depuis des millénaires
ont gravé des signes qu’on a maintenant
peine à déchiffrer.
Avec gravité,
ils me parlent donc du temps. Ce temps invisible,
mais qui ne cesse d’user, de dégrader,
de détruire ce que nous sommes et édifions.
Mais tout en reproduisant les apparences de ce qui
a subi son inlassable travail d’érosion,
ces tableaux se dressent dans l’intention de
lui faire échec, de repousser la mort, d’affirmer
la vie.
Charles JULIET. écrivain
hiver 1995
extrait de « Césure n°4 » éditions
Ombres et Lumières
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